L’Art des interstices est un roman. Un roman écrit à la première personne, par un père qui s’inquiète de l’avenir de sa fille, dix-sept ans en terminale. Il s’inquiète aussi des comportements présents de cette adolescente. Sa mère s’est suicidée..
Dans l’Art des interstices le narrateur parcourt le monde de l’art contemporain, sous ses différentes facettes, officielles, marchandes mais aussi marginales, méconnues. Une odyssée pour le père, mais si l’on se place du point de vue de la jeune fille, plutôt un roman d’apprentissage.
Des personnages très connus (Soulages, Buren etc) et d’autres, sont admirablement décrits par leurs façons de parler ou de penser et donnent lieu à des scènes savoureuses : la dimension tragique de notre époque étouffante, telle la tunique de Nessus, et l’intrigue inquiétante qui se joue dans le récit donnent lieu en contrepoint à des observations amusantes et des commentaires plein d’humour. Vous verrez à plusieurs reprises comment le simple fait d’écrire en italique un mot (un tic de langage, une scie à la mode) peut suffire à en souligner le ridicule tout en restant apparemment sérieux.
Pour profiter pleinement de cette lecture prévoyez de rester connectés sur Google pour trouver des images illustrant les nombreux peintres que l’auteur cite. Ou alors, oui, si vous préférez lire sans vous interrompre, vous les notez et vous irez voir après avoir fini le livre.
L’Art des interstices intéressera surtout lles lecteurs qui, à un moment ou un autre, ont ressenti le poids de l’idéologie anti-figurative. De l’abstraction imposée. Qui en ont assez d’entendre qu’après l’urinoir de Marcel Duchamp on ne peut plus peindre comme avant. De ceux qui ont un peu honte de ne pas « comprendre » certaines choses que des « médiateurs » formatés leur expliquent pourtant avec condescendance, mais qui sentent très bien, d’emblée, que ce ne sont là que des baudruches sans intérêt. Un ersatz d’art, dépourvu de transcendance, (bien sûr ! Ah ah ah quelle idée !) mais aussi dépourvu de sens, ou de sensibilité, ou encore de travail, ou même de soin, de savoir-faire, tout simplement. Les trucs cache-misère, les procédés d’esbroufe, cela se reconnait surtout si l’on n’est pas expert assermenté… Comme si, en 2017, j’écrivais bla bla bla, bla bla bla, bla bla bla, bla bla bla, bla bla bla, pendant des pages pour faire moderne et épater.
L’Art des interstices a tout de suite trouvé sa place dans ma bibliothèque près des romans de Michel Houellebecq et des essais de Philippe Muray. il y avait déjà les deux ouvrages précédents de Pierre Lamalattie (« 121 curriculum vitae pour un tombeau » et « Précipitation en milieu acide« )
Pour en savoir plus sur Pierre Lamalattie, le mieux est d’aller sur son site, en cliquant ici.
Et voici un petit extrait d’une musique qu’il aime , le début du mouvement Presto du Quintet avec piano de Sofia Gubaidulina (née en 1931) : c’est moins diffusé que les rocks de Jeannot Vaconce, (qui vient de mourir, cela n’a pas pu vous échapper, ou plutôt, vous n’avez pas pu y échapper…) mais c’est pas mal non plus.
(Quatuor Molinari avec Louise Bessette au piano, Cd édité par Atmaclassique 2015)