Hommage à Escher : un bas-relief
réalisé avec des éléments moulés au silicone
(Je prononce « èss-chèr » et vous ?). Maurits Cornelis Escher, né en 1898 mort en 1972, plus couramment nommé M. C. Escher, est connu pour ses gravures sur bois et ses lithographies souvent inspirées des mathématiques (mais il n’était pas lui-même mathématicien).
Je suis parti de ces deux reproductions
La deuxième contient, en plus de la répétition du motif qui remplit le plan, une gradient de variation du noir au blanc de bas en haut : en bas le cavaliers blancs apparaissent sur fond noir et en haut ce sont les cavaliers noirs (qui vont en sens inverse) qui se détachent sur fond blanc…
Dans cette composition, Escher réalise ce qu’on appelle un pavage du plan, c’est-à-dire un remplissage complet effectué par répétition d’un seul motif. Mais ici le motif de base n’est pas celui qu’on croit au premier abord, le motif est double : il est constitué d’un cavalier et de son reflet en miroir (par symétrie) : toute la prouesse d’Escher réside dans le profil de l’un et de l’autre, qui s’assemblent d’abord en une seule figure, et c’est cette figure qui va elle-même s’assembler, s’emboîter ensuite par translation dans les directions gauche-droite et haut-bas… et remplir le plan comme les pièces d’un puzzle.
Pour réaliser la frise en 3D, le bas-relief, il a d’abord fallu que je modèle séparément les deux figures, appelons-les ‘Gauche’ et ‘Droite’. J’ai utilisé pour cette étape une pâte à modeler américaine de luxe, « Super Sculpey » en vente sur internet par paquet de 500g ; ça coûte la peau des fesses, mais c’est réutilisable et aussi agréable à travailler que la vraie peau des fesses.
J’ai travaillé sur des photocopies agrandies à la dimension souhaitée et en intercalant une surface transparente en plexiglas, ce qui explique le reflet ci-dessous et le fait que la pâte ne collait pas au papier…
Ensuite, j’ai réalisé deux moules en silicone de ces deux figures en bas-relief. J’ai choisi un silicone utilisé par les dentistes, qui présente l’avantage de se mélanger de façon très simple (1 dose de durcisseur pour 1 dose de produit) et d’être indolore, même sans anesthésie. « Wagnersil » un produit qui vient d’Allemagne, comme son nom l’indique, et qui m’a coûté un bras. Façon de parler, j’espère que n’importe lequel des bras qui me restent vaut plus de 60 euros. Avant de verser le produit (qui prend sa consistance définitive en 5 minutes seulement , mais coule comme de l’eau au début des 5 minutes…) il faut réaliser un cadre et penser aussi à le faire assez haut…)
Avec un litre de produit (les deux flacons) ça tombait pile poil, mais j’aurais pu économiser en largeur sur les bords..
Oui, la nappe qui protège la table est très « seventies », très moche. Ensuite, j’ai calé ces deux moules (souples et roses) dans une gangue de plâtre, de façon à pouvoir ensuite remplir les moules en étant certain de leur stabilité . Cette fois le cadre dans lequel est versé le plâtre est en argile (grise) qui se retire facilement dès que le plâtre a durci..
Ce qui donne , une fois « détouré » de l’argile et retourné à l’endroit, prêt pour les tirages :
Puis, j’ai coulé dans les moules du plâtre pour staff, autant de fois qu’il fallait. Un demi- sac de plâtre m’a suffi largement, ça au moins c’était peanuts pour le porte-monnaie… (Quand les taxes et les impôts auront tellement augmenté qu’on ne pourra plus rien s’offrir, on pourra tout de même s’acheter du plâtre, c’est rassurant). Les moules étant réutilisables, il serait maintenant possible d’effectuer des tirages en résine ou en ciment, si on voulait. Mais le voudra-t-on ?
Au fur et à mesure, je mettais les éléments (moulés deux par deux) à sécher au pied de la bibliothèque Ikea : sachant que les carreaux ci-dessous, qui datent des années 70, mesurent 20×20 cm, la photo donne une idée de l’ensemble presque fini. ( il en manque encore trois, mais au total j’en ai fabriqué bien plus que 30, car il y a eu de la casse : je suis né avec deux mains gauches..)
Les cavaliers et les fonds en bois (MDF medium épaisseur 10 mm) ont été peints avec de la peinture en spray, la fourniture préférée des taggeurs : quatre bombes à 7 euros l’une, chez ABC Créations à Villeneuve-sur-Lot ( au point où j’en étais, je n’ai même pas pensé à demander la réduction « étudiant »). Ils proposent un choix incroyable, plus de cent couleurs différentes. J’ai choisi deux nuances d’une même teinte, ocre clair et foncé . J’ai bricolé une cage à peindre, mis un masque, bien secoué la bombe, jeté un coup d’œil à droite et à gauche pour voir si les flics n’étaient pas dans le coin, et psch-sch-schitt en tenant la bombe bien verticale (la haie, derrière, n’en menait pas large)
La dernière étape consiste à fixer chaque figure à la bonne place sur les panneaux en bois, que j’avais précédemment achetés et fait découper chez Mr Bricolage (« Vous avez la carte du magasin ? – Non, merci »). J’ai utilisé une Colle Pattex tous matériaux, à l’aide d’un pistolet à colle acheté chez Mr Bricolage un autre jour (« Vous avez la carte du magasin ? – Non ! merci !». Les cavaliers ‘Droite’ (nuance claire) sont collés sur fond plus foncé et réciproquement pour les ‘Gauche’.
Il y a trois points de vue sur l’ensemble : si l’on se place à gauche, on ne voit que les cavaliers partant vers la droite (et la silhouette des autres, en fond, entre eux !) :
Si l’on se place sur la droite on ne voit que les cavaliers allant vers la gauche (et l’empreinte de ceux en sens inverse entre eux).
Et vu de face , c’est encore autre chose. (1m50 de large, 60 cm de haut) et cela s’appelle « Hommage à Escher »
Merci à Germano Frias, à Juliette Gory, qui est venue deux fois m’aider à avancer le travail, à Claude Blanchet, qui me suggère volontiers des trucs et des astuces, à Christian Rampnoux qui m’a reçu dans son atelier et m’a donné des conseils d’expert pour les moules en silicone, et à Françoise pour un tas d’autres raisons (« Bien ! Et maintenant on va les mettre où ? » demande-t-elle )